Initiative Canut insoumis
Loi asile et immigration :
toujours plus dure
Le gouvernement Macron a proposé à l'Assemblée nationale l'adoption d'une énième loi sur l'asile et l'immigration le 21 février 2018. On peut douter de sa capacité comme les précédentes à s'attaquer aux véritables causes des migrations et à les réguler dans le respect des droits de l'Homme et des engagements pris par la France. En revanche, l'on peut être sûr d'une chose, cette loi vise à faire de la vie des migrants en France un enfer, qu'ils soient éligibles ou non au droit d'asile, régularisables ou non.
DES ENGAGEMENTS NON TENUS
Rappelons que la France s'était engagée à re-localiser 30 000 Syriens arrivés en Grèce et en Italie avant la fin 2017. Seuls 4 278 venus essentiellement de Grèce ont été accueillis en France. Où en est-on de l'annonce du président Macron concernant la création de voies d'accès depuis le Tchad et la Lybie suite aux révélations sur des migrants subsahariens vendus sur des marchés aux esclaves ? On sait aussi ce qu'il en est de sa promesse faite cet été qu'il n'y aurait « d'ici à la fin de l'année (…) plus personne dans les rues ». Rien qu'à Lyon au mois de novembre l'association Jamais sans toit comptait 194 élèves SDF et 120 mineurs étrangers isolés non pris en charge. Fin janvier, 170 personnes dont des familles et des enfants seraient à la rue sans la réquisition par des citoyens et des associations d'un bâtiment désaffecté. Les 60 migrants du camp de l'esplanade Mandela vivant sous tente et dans la boue à deux pas de la Part Dieu ont été expulsés et dirigés pour 10 jours vers un gymnase. Et après ?
UNE SEULE POLITIQUE : POURCHASSER et HARCELER
Faire la chasse aux migrants demeure le principal objectif du ministre de l'intérieur en leur coupant l'eau, en détruisant leurs abris ou en les expulsant des terrains et des squats qu'ils occupent. La circulaire Collomb du 12 décembre 2017, demandant aux gestionnaires de centres d'accueil de fournir la liste de tous les hébergés, remet en cause le principe légal d'accueil inconditionnel en hébergement d'urgence et éloigne les étrangers de ces structures par crainte de fichage et d'expulsion. 27 associations ont saisi le conseil d’État pour en demander sa suspension.
UNE SEULE LOGIQUE : TRIER – CONTROLER – EXPULSER
La nouvelle loi, dont l'efficacité à résoudre les problèmes est loin d'être prouvée, restreint toujours plus les droits des migrants. Ses seuls objectifs visent à trier les « bons » des « mauvais » migrants par une justice expéditive, à faire de la rétention un outil privilégié pour mieux contrôler, surveiller et expulser en plus grand nombre au mépris du droit. Parmi les nouvelles mesures, la justice et les droits sont bafoués avec la réduction de 120 à 90 jours le délai maximum pour demander l'asile à compter de l'entrée sur le territoire, et de 30 à 15 jours le délai de recours devant la CNDA, la cour d'appel que le demandeur d'asile peut saisir s'il est débouté. La durée de rétention administrative souvent dans des conditions indignes est doublée passant de 45 à 90 jours, voir 135 jours dans certains cas. Des centres seront dédiés aux dublinés (ceux qui ont été enregistrés dans d'autres pays que la France) où ils seront internés avant même la prise d'une décision d'éloignement qui pourra se juger dorénavant non plus au tribunal mais sur place par vidéoconférence. Des arrestations à l'issue des audiences seront possibles et le droit de communiquer avec un avocat ou un médecin pendant les transferts interdit. Les associations actives dans l'hébergement et l'accompagnement des étrangers ont dénoncé le caractère déséquilibré de cette loi à la visée restrictive des droits et inhumaine des étrangers migrants. Les avocats et des agents de la cour nationale du droit d'asile ont mené une grève pour dénoncer « une logique comptable » et l'absence de moyens pour mener correctement leur mission.
AU BOUT DE L 'ENFER quelques mesures positives
Notamment pour les étrangers qui n'ont pas le statut de réfugié mais obtiennent quand même la « protection subsidiaire ». Un titre de séjour de 4 ans et non plus d'un an seulement leur sera délivré. C'est une avancée indéniable mais dont on mesure bien les efforts déployés par le gouvernement pour limiter le nombre de bénéficiaires et l'absurdité du harcèlement qu'ils auront dû subir avant son obtention. Des mesures visent également à améliorer l'attractivité de la France pour les étrangers hautement qualifiés et à créer un statut « jeune au pair » pour des jeunes hébergés par une famille en contrepartie de la garde d'enfants et de menus travaux. Tiens, tiens.
DE L'HUMANITAIRE AU POLITIQUE
Plutôt que de laisser les gens entre 5 et 10 ans à la dérive en les pourchassant pourquoi ne les fait-on pas entrer dans le droit commun ? Pourquoi ne pas précéder l'instruction des dossiers par un travail social plutôt que par du harcèlement ?
A court terme, le programme l'avenir en commun de la France insoumise propose de faciliter l'accès à un hébergement pour que personne ne vive dans la rue et de traiter dignement dans le respect du droit les demandes d'accueil en France et en Europe. A moyen terme, pourquoi ne pourrait-on pas ouvrir d'autres voies de régularisation que la seule demande d'asile (100 000 demandes pour 32 000 accords en 2017) en donnant en priorité un statut et des droits aux familles d'enfants scolarisés et aux travailleurs sans papier.
A plus long terme, nous devrions nous intéresser aux raisons des migrations, qui sont toujours complexes et pas seulement réductibles ou à la guerre ou à la misère économique. Il convient d'agir du niveau local au niveau international sur les causes géopolitiques, sociales, politiques, économiques, climatiques qui poussent ou obligent des populations à quitter ou fuir leur pays. Enfin, la mise en place d'une organisation mondiale des migrations sous l'égide de l'ONU permettrait de combiner à la fois des réponses d'urgence et des politiques de court, moyen et long terme.
Programme migrations de la FI https://avenirencommun.fr/carte-programme/les-migrants/