[Projet] Jus t'M

Fabriquer et vendre des jus de fruits à partir de fruits et légumes issus du gaspillage alimentaire. À terme le faire en embauchant des personnes en réinsertion.

Alexandre Gubert Mon 11 Jun 2018 2:06PM
Top! tu l'as en stock ?

Alexandre Gubert Mon 11 Jun 2018 2:53PM
J'ai lu le résumé de ton lien et j'ai du mal à comprendre de quelle ESS ils parlent (le Crédit Mutuel, un exemple de l'ESS?). Par contre je suis tout à fait d'accord, qu'il ne faut pas tirer les droits sociaux vers le bas et dans le même temps exiger plus des travailleurs..
En fait je pense qu'une des solutions à ça c'est le système de l'entreprise libérée:
* fini la distinction décideurs vs employés
* finis les problèmes de salaires
* de la transparence pour plus de communication
Meldane Mon 11 Jun 2018 4:12PM
Ça c'est l'idéal, mais il faut garder à l'esprit la diversité de la réalité : tout le monde n'est pas prèt à s'investir assez dans une boite pour prendre le temps de se forger une opinion et participer aux décisions.
Les gens ont parfois besoin d'un gagne pain rapide et temporaire, un truc pas prise de tête car ils⋅elles ont d'autres projets persos qui leur tiennent plus à cœur... et ils⋅elles ne partagent pas forcément les idéaux de la boite qui les embauche, même si elle favorise leur réinsertion dans le monde du travail...
Donc le concept de l'entreprise libérée est bien pour beaucoup, mais pas pour tou⋅te⋅s. Il me semble important d'entretenir la diversité et surtout la flexibilité (de chaque côté).
C'est ça notamment que ce livre met en évidence.
Non, malheureusement, je ne l'ai pas, je ne peux pas te le prêter...

Alexandre Gubert Mon 11 Jun 2018 4:35PM
J'aime beaucoup cette idée de flexibilité ... mais alors comment faire ?

Alexandre Gubert Tue 12 Jun 2018 12:37PM
En fait en réponse à ce que tu exprimes, je pense que c'est nécessaire d'avoir une base de démocratie dans l'économie. Après je suis d'accord avec toi, d'autant plus dans un projet de réinsertion, il faut que l'emploi puisse être temporaire. Du coup, on peut mettre deux types de statuts genre ceux qui restent sur le long terme et ceux qui sont la en court terme (un peu comme CDI vs CDD).
Ou alors, on dit que tout le monde a le même statut et que l'opinion de tout.e.s compte, à la limite avec des poids différents ou dans des assemblées différentes.
Pour les gens qui s'en foutent de donner leur avis, trois solutions : soit on choisit de ne pas les embaucher parce qu'on considère qu'on aura assez de main d'oeuvre intéressée par le projet, soit on les incite à participer, soit on fait en sorte de ne pas avoir besoin de leur avis.
Meldane Wed 13 Jun 2018 10:50AM
L'action sociale et l'économie sont deux choses différentes. À vouloir combiner les deux, on a plus de chance de les affaiblir toutes les deux à mon sens.
Permettre à celles et ceux qui ont eu un parcours de vie difficile de se réinsérer dans le monde professionnel est une bonne chose, mais pour moi cela passe davantage par du soutien à une formation professionnelle, ainsi qu'à un soutien personnel et matériel qui leur sont bien souvent nécessaires.
Une campagne de sensibilisation me semble aussi importante pour tenter de diminuer les stigmatisations et discriminations, et donc permettre réellement à chacun.e d'avoir sa chance.
C'est le rôle de l'État et ce qui donne sens à nos impôts à mes yeux, mais c'est aussi ce que certaines associations ou collectifs peuvent contribuer à renforcer en faisant circuler le savoir, en partageant ou laissant à disposition du matériel, des outils, en sensibilisant etc...
Par contre, s'il on se met à embaucher quelqu'un en fonction de la situation de quelqu'un plutôt qu'en fonction de ses compétences, on rentre dans un terrain plus que glissant, je trouve.
Il est déjà difficile en soit pour une entreprise d'être viable, même en incluant des personnes fortement impliquées et qualifiées, alors si rechercher la qualité de la force de travail n'est pas la top priorité, cela me paraît plus que compromis.
Une telle entreprise ne pourrait d'ailleurs offrir que des emplois précaires à mon sens, et c'est justement la réalité que met en évidence l'étude de terrain de ces deux sociologues.
J'aime beaucoup le dicton "l'enfer est pavé de bonnes intentions", car il rappelle à juste titre, que même avec les meilleures intentions du monde, il est possible de créer "un enfer", en tout cas des conditions de travail qui seraient pires que ce que l'on trouve dans les entreprises actuellement.
En ce qui me concerne, je ne souhaite en tout cas pas m'associer à des projets qui ont pour objectif final d'employer qui que ce soit. C'est le rôle et le fonctionnement d'une entreprise à mes yeux, pas d'un collectif.
Une entreprise peut être tout à fait éthique et respectueuse dans sa recherche du profit et de son utilisation. Et il peut être très intéressant de se lancer dans ce type d'aventure, mais ça, c'est un boulot à temps plein pour moi justement ! ;)

Alexandre Gubert Wed 13 Jun 2018 1:36PM
Sur le sujet du collectif : C'est un ensemble d'organismes hétéroclites qui se rassemble autour d'un sujet --> reboucler la boucle (sauf erreur?). Si les actions menée par un des membres du collectif crée des emplois, tant mieux, non? Et si, à titre personnel, tu ne souhaites pas être liée à l'action en question, libre à toi !
Je suis d'accord avec toi concernant les embauches, qu'il vaut mieux prendre la personne la plus compétente. Cela dit, quand le projet en question consiste en la fabrication artisanale de jus de fruits, j'ai tendance à penser que la personne la plus compétente n'aura pas un master en cuisine mais plutôt de la motivation.. Et qui est plus motivé qu'une personne a qui on donne une deuxième chance dans la vie ?
Concernant la citation, je préfère de loin un enfer pavé de bonnes intentions (sociales, démocratiques, environnementales), qu'un enfer dont la base est glissante dès le départ (individualisme, sacralisation du profit, ultra-libéralisme). Mais ça n'est que mon humble avis ;)

Alexandre Gubert Mon 18 Jun 2018 12:06PM
Du coup, @unutao si le collectif est un organisme qui ne gère pas d'argent mais dont les différentes organisations membres peuvent gagner de l'argent, ça irait pour toi ?
Meldane Thu 21 Jun 2018 1:41PM
Une "organisation qui peut gagner de l'argent", c'est une façon descriptive de parler d'une entreprise, non ?
Il est important de parler clairement pour qu'on s'y retrouve... ;)
Quel est l'objectif réel de ce collectif du coup ? De permettre de créer des opportunités professionnelles ? Et pour qui ?
- Pour des personnes qui ont besoin d'être accompagnées dans leur réinsertion professionnelle ?
- ou pour des personnes qui cherchent à construire quelque chose qui les intéresse ? ____
L'important pour moi est surtout de me pas m'associer, de près ou de loin, à une entreprise qui aurait des conséquences sociales négatives à mes yeux.
Or même si le projet de Jus T'M se base sur les intentions louables, il part d'hypothèses qui m'apparaissent trop en décalage avec la réalité pour justement ne pas avoir de répercussions négatives à terme.
Il me semble essentiel de ne pas confondre "personnes en réinsertion", "personnes victimes de discrimination" et "personnes désespérées financièrement".
Les personnes en réinsertion n'ont pas juste besoin qu'on leur accorde une deuxième chance dans la vie, elles ont besoin d'être accompagnées dans les difficultés qui les ont amenés à avoir des vies brisées (ancien⋅ne⋅s travailleur⋅ses du sexe, ex-prisonnier⋅ère⋅s, victimes de maltraitances sévères etc...) ou ont des difficultés de naissance particulières comme les personnes trisomiques, c'est pour ça que des aides de l'état peuvent être attribuées pour leurs embauches, mais il est important de ne pas sous-estimer sa propre responsabilité en les embauchant.
Ce sont des personnes qui par définition ont été fragilisées. Elles ne se caractérisent pas par leur motivation, mais plus par leurs difficultés ou peurs, comme celles de l'engagement professionnel par exemple. Cela nécessite de s'entourer de travailleurs sociaux qui seront plus à même de connaître leurs difficultés et de pouvoir les accompagner correctement.
Les personnes victimes de discrimination, comme par exemple une personne transgenre dont le transgenderisme est visible, pourra être très motivée pour faire ses preuves car elle aura conscience d'avoir moins d'opportunité que les autres. Cela ne voudra pas dire que presser des fruits toute la journée restera quelque chose qu'elle trouvera intellectuellement stimulant. Et il me paraîtrait plus bénéfique de faire des campagnes publiques pour que les discriminations à l'emploi cessent s'il s'agit de soutenir cette catégorie de personnes.
Celles qui sont désespérées financièrement pourront accepter n'importe quel boulot et se montreront motivées car pressées par la nécessité, mais cela ne veut pas dire qu'elles n'étaient pas déjà insérées professionnellement...
Employer des personnes qui sont dans une situation de détresse financières et qui sont prêt à accepter un travail rébarbatif sans la protection sociale que seule une entreprise rentable peut offrir n'est pas éthiquement envisageable, pourtant ce projet, tel que présenté, aurait plutôt tendance à mener à ça à mes yeux, tellement la question de la rentabilité semble balayée trop rapidement.
Idem pour l’investissement. Ce projet nécessite un investissement financier initial. Si la recherche du profit n'est pas plus l'objectif car assimilé à de l'avarice, comment est rémunéré le risque et qui le prend ?
Si crowfunding il y a, il est nécessaire d'avoir une comptabilité extrêmement carrée pour permettre la transparence et garantir que l'argent confié n'a pas été gaspillé. Et à nouveau, pour le permettre, il faut se pencher sur la rentabilité de l'entreprise...
Quant au fait de récupérer des fruits jugés impropres à la consommation pour en faire des jus de fruits, cela ça pose aussi certaines questions : on ne peut pas se permettre un trop grande légèreté en ce qui concerne la sécurité alimentaire... Et si c'est pour éviter le gaspillage alimentaire de produits consommable, des associations caritatives récupèrent déjà les fruits abîmés pour les redistribuer...
Je ne partage pas une vision de la société où il y aurait d'un côté les bon⋅ne⋅s (soucieux⋅ses des autres) et de l’autre les mauvais⋅e⋅s (individualistes, aveuglé⋅e⋅s par le profit, ultra-liberalistes etc...).
Pour moi le bon et le mauvais peuvent se retrouver en chacun.e de nous et le mauvais a tendance à se développer lorsqu'on arrive pas à s'imaginer pouvoir l'être, je pense. Car lorsqu'on reste persuadé de n'aboutir qu'à de bonnes choses sous prétexte de le vouloir, on cesse bien souvent de se remettre en question...
Le fait de ne pas gérer d'argent limite les possibilités d'impacts négatives à mon sens, car cela réduit frottement les risques de détournement d'action pour servir des ambitions et profits personnels et cela m'apparaît aussi plus cohérent avec la constitution d'un collectif.
Mais pour savoir si je continuerai à m'impliquer ou non, je vais avoir besoin de mieux connaître la feuille de route de ce collectif et vers quoi il se dirige réellement, en dehors des objectifs affichés. 8)
Meldane · Mon 11 Jun 2018 1:45PM
Pour ne pas tomber dans les travers que l'on retrouve dans l’Économie Sociale et Solidaire la plupart du temps, surtout dès que l'on se met à employer du personnel, je conseille de lire le livre écrit par deux sociologues, Matthieu Hély et Pascale Moulévrier, qui ont fait une étude de terrain sur le sujet : L’économie sociale et solidaire : de l’utopie aux pratiques
Il m'a paru en complète adéquation avec la réalité que j'ai pu moi-même constater : le grand décalage entre les décideur⋅euse⋅s, plus épanoui⋅e⋅s dans leurs boulots car ils⋅elles y trouvent un sens, et celles et ceux qui sont censé⋅e⋅s en bénéficier...