Réintégration d'anciens laborantins ?

[Team Care] Il y a deux ans a eu lieu ici une discussion publique au sujet de l'exclusion d'une personne ayant commis un viol lors d'un GN. Lors de cette discussion, une autre personne a déclaré avoir elle aussi commis un viol lors d'un GN.
Aujourd'hui, le mandat care, sécurité émotionnelle et gestion des conflits propose d'ouvrir une nouvelle discussion collective pour évoquer la question de la réintégration ou non de ces deux personnes et d'une manière plus générale, comment les participant·es à LaboGN désirent se positionner dans ce genre de situation.

Juliette Tue 7 Sep 2021 8:29PM
De mon côté, je suis ou j'ai été - pour expliciter mon positionnement - assez proche de l'un et de l'autre. Néanmoins, je pense que l'impartialité n'existe pas.
En pensant bien faire, nous avons fait collectivement n'importe quoi il y a deux ans. Nous n'avions pour la plupart ni réflexion approfondie, ni expérience, ni outils. Aujourd'hui, nous avons la possibilité de tenter de réparer le mal qui a été fait.
Quand quelqu'un regrette ce qu'il a fait, qu'il a fait l'objet d'un accompagnement et qu'il n'y a pas de victime à protéger, je ne vois pas au nom de quoi on devrait continuer à priver d'anciens laborantins d'un espace qui se veut accueillant. La culture de l'ostracisme n'est jamais la solution.
Il me semble également essentiel que le mandat care, sécurité émotionnelle et gestion des conflits se forge des outils efficaces au cas (malheureux mais possible) où de nouveaux faits surviendraient : si vous avez des idées, nous sommes à l'écoute !
Lucie Chpt Wed 8 Sep 2021 10:11AM
Je rejoins les avis exprimés par Axiel et Juliette. Le guide "Gestion des conflits" sur lequel travaille Axiel devrait pouvoir permettre au mandat Care de se forger des outils justement.
Oaken Wed 8 Sep 2021 4:00PM
Y'a un truc qui me chafouine dans ce qui est dit, quand je lis il n'y a pas de victime à protéger: la nuance c'est qu'il n'y a pas leurs victimes à protéger, mais il y a des victimes à protéger.
Je reste pas à l'aise pour accepter une personne responsable d'un viol à LaboGN.
Je bosse en prison, je pense que la justice est à réformer, mais même si LaboGN est un lieu d'expérimentation, je ne pense pas que soit le lieu pour ça.
Axiel Thu 9 Sep 2021 8:07PM
Statistiquement on peut considérer qu'au moins un homme cis sur six a commis ou commettra un viol (à moins de considérer qu'il y a une poignée de personnes qui violent 75000 personnes par an). Exclure les personnes qu'on sait responsables (toutes circonstances confondues) est au mieux inefficace (ça rend d'autant plus difficile de reconnaître les faits quand on les a commis, parce que la sanction sociale est sans appel), au pire assez malhonnête intellectuellement. Je suis mal à l'aise avec la connotation de pureté que ça apporte, j'ai l'impression qu'en excluant les personnes qu'on sait ou suppose avoir commis un viol/une agression on procède davantage à un rite de blanchiment communautaire qu'à autre chose.
Et, parlant en tant que survivant·e également : même si je ne serais pas à l'aise avec le fait de partager un espace avec mon agresseur (fortuitement il a été muté en Guyane juste après, j'ai donc la "chance" de ne pas avoir eu à me poser ces questions en pratique), dès le départ c'était important pour moi qu'il puisse être accompagné dans sa remise en question et pas abandonné dans la nature sans clés et sans groupe social résilient qui lui permettraient de ne pas recommencer. Je ne sais au demeurant pas si le fait que nos ami·e·s commun·e·s ne rompent pas le contact a eu les effets escomptés (je peux l'espérer, mais je n'ai pas envie de mener l'enquête, pour d'évidentes raisons), mais je suis 100% sûr·e que si tout notre groupe social commun lui avait tourné le dos il serait retombé dans les mêmes patterns ayant mené à des viols.
Bref je voulais pas partir dans le témoignage, mais je pense vraiment que l'exclusion définitive n'est pas une solution, ni individuellement ni d'un point de vue structurel. Et je suis persuadé·e qu'une portion significative de personnes (notamment mecs cis parce que le patriarcat, mais pas que) ont commis des agressions, la plupart du temps sans les comprendre comme des agressions, et exclure les personnes qui ont le label Agresseur™est une posture morale plutôt que pragmatique. Et les postures morales ne protègent pas les victimes.
Leïla Wed 8 Sep 2021 6:37PM
Bonjour,
Je me rends compte que je ne me sens pas confortable à m'exprimer sur Framavox car cette discussion est publique, trouvable depuis un moteur de recherche.
Serait-il possible de la relocaliser sur le Discord du labo ? (par exemple, recopier les messages postés jusque là) ?
Cela permettrait de dire de qui on parle au lieu de garder un flou qui créé de l'asymétrie d'infos dans la discussion (une partie des gens voient de qui il s'agit, mais sans doute pas absolument tout le monde), et de dire d'où on parle (expliciter les liens quand c'est pertinent, que les personnes concernées puissent s'exprimer et qu'on puisse s'adresser à elles directement aussi). Cela serait aussi plus sécurisant pour une partie des personnes susceptibles de s'exprimer, dont moi.
Enfin, je crois qu'il faudrait faire plusieurs sujets séparés : une consultation générale sur le souhait pour la culture de Labo-GN sur ces questions, dont le mandat care et gestion de conflits pourra se saisir, et des prises de décision sur les situations spécifiques (et si prise de décision il doit y avoir, c'est entre membres du collège dirigeant - on a des statuts quand même ^^ - et il me semble en discutant avec les personnes concernées aussi).
Merci d'avance !
Zandera Fri 17 Sep 2021 10:29PM
Je m'exprime sur le thème général et non sur les affaires précédentes.
Comme l'a dit Axiel : 1 homme sur 6.
Pour moi, un mec qui a reconnu avoir violé et a été accompagné est bien bien moins dangereux que la majorité des autres mecs : un certain nombre sont déjà des violeurs, souvent sans le savoir, ils ne savent pas que mettre la pression, faire du chantage affectif ou profiter de l'ébriété, c'est du viol, et donc ils sont plus susceptibles de violer dans le futur que les "réhabilités". Donc je suis fermement contre le fait d'exclure sur la base d'un "casier" passé uniquement. (J'utilise un langage vocabulaire pseudo-judiciaireà dessein : même si nous parlons de cas qui ne sont pas passé devant la justice (comme la majorité des viols), comme chaque communauté, nous avons nos propres lois sociales. Décider si d'anciens violeurs peuvent être réhabilités ou non est une décision en la matière.)
En revanche, je suis aussi fermement pour la protection émotionnelles des victimes et pour leur leur donner la priorité dans l'accès à des événements sociaux car le fait d'avoir subi un viol ou autres formes d’agression sexuelle est quelque chose qui conduit fréquemment à l'isolation. Donc si des survivantes demandent l'exclusion de leurs agresseurs, même s'ils ont été réhabilités, pour moi leurs besoins l'emportent. Pour reprendre ma comparaison avec le système judiciaire, cela revient à l'interdiction d'approcher une victime, ici en fonction du choix de cette dernière.
Angus Foggie Mon 15 Nov 2021 10:34AM
Mon contribution est en Anglais. Désoler mais je peut pas écrire précisément en Français. Si le language est un problem est ce que quel qu'un peut traduire mon text et post ici?
Problem: Two members admitted to rape
Ideal but impossible solution: They can return after a restorative justice process and no one gets assaulted ever again.
Realistic solution: They can return as part of restorative justice and no one gets assaulted as a result of this process.
1 in 6 men have committed sex crimes. But because we don’t know who they are, we cannot stop them reoffending. When we do know an offender’s identity we have a special responsibility.
A. Encouraging an environment where people could admit to crimes and face restorative justice would be good.
B. Sex crimes are unacceptable. Therefore justice (of whatever kind) must be seen to be done. We must have zero tolerance for sexual violence. This will give confidence in the relative safety of the environment and provide a deterrent to offenders.
C. If an admitted rapist was allowed back to an event and then committed a sexual assault the organisation would be partially responsible.
C is the most important. Regardless of our confidence in the success of A we must not reduce safety in favour of an experiment in restorative justice.
How to prevent reoffending
Option 1: Excluded
The most sure. But not restorative.
Option 2: Clearly labelled
Surely we don’t want this. They would suffer terribly from having Rapist printed on their badge.
Option 3: Accompanied at all times.
The police advise this: ‘Don’t leave former offenders alone with their victims.’ But no one is going to want this mandate.
I recommend a practical version of 3:
Option 4: Day Visit
Only permitted to attend during the day. They sleep off site and leave at 8pm and return at 9am. They don’t have a room of their own and are asked to keep out of the bedrooms and avoid being alone with other members.
Could we also say that if they attend as Day visitor for two years and are seen to observe the rule they might get returned to normal status after a vote?
Axiel Tue 16 Nov 2021 5:56PM
Thanks for these thoughts Angus! I'll answer in French, for practical reasons. If you have any trouble understanding, you know where to find me :)
Forcément, mon approche est restaurative. Je voudrais simplement réagir sur C : l'organisation est partiellement responsable si une agression est commise même si la personne responsable n'était pas identifiée comme "agresseur/violeur". Il s'agit de créer les conditions pour que ces situations ne soient pas favorisées. Il s'agit ainsi d'une politique de réduction des risques.
Par ailleurs, je pense - peut-être naïvement - qu'une personne qui a déjà reconnu des agressions n'a pas plus de chances d'en reproduire que n'importe qui d'en commettre. Je ne me risquerai pas à dire "moins de chances", parce que je n'en sais rien, mais il me semble qu'une des caractéristiques de la culture du viol est de "diaboliser" l'idée de viol/violeur et d'ainsi rendre très difficile le fait de réaliser qu'on est soi-même en train/qu'on a commis un viol/une agression. Une fois mis devant le fait que nous avons effectivement commis ces actes, ils sortent de l'impensable... (je m'égare, tout ceci n'est que spéculation)
Concernant les options que tu proposes :
1) L'exclusion n'est pas une solution satisfaisante pour moi, sauf cas exceptionnel (risque avéré de sécurité)
2) Comme tu le dis, ça n'est pas envisageable. Littéralement porter le stigma n'est pas quelque chose que nous avons envie de vivre en tant que communauté...
3) Demander aux personnes de ne pas se retrouver seules avec les personnes qu'elles ont agressées est possible sans qu'il y ait besoin de chaperon. Demander de garder la distance et organiser un partage d'espace est tout à fait faisable.
4) Le fait d'être là jour et nuit appartient au format de LaboGN. Si des exceptions sont possibles pour des raisons de sécurité, d'autres dérogations (volontaires) seront sans doute demandées, et la forme de l'événement changera alors beaucoup (plus proche de BetaLarp, ou certain·e·s participant·e·s dorment sur place et d'autres non)
Concernant le fait de soumettre au vote, la question de l'étendue du vote se pose (qui vote), ainsi que la validité d'une telle méthode. Étant anarchiste, je penche toujours en faveur du consensus.
Axiel · Tue 7 Sep 2021 4:57PM
Mon avis est que la mise à l'écart de personnes ne peut être motivée que par l'existence d'un danger immédiat pour les participant·e·s, et ne peut en aucun cas être considérée comme définitive. Pour une de ces personnes au moins, un processus d'accompagnement a d'ores et déjà eu lieu, auquel j'ai participé, et il ne me semble pas justifié de maintenir l'exclusion (le critère du danger n'étant pas rempli).
D'un point de vue structurel, il est sans doute possible de produire des protocoles de suivi permettant de gérer les prochaines situations se présentant, en priorisant l'accompagnement des personnes. Il me paraît important que les critères de décisions soient basés sur le soin aux personnes victimes et leurs besoins réels, ainsi que les risques potentiels causés par la personne ayant commis des violences, et pas sur des critères punitifs ou rétributifs (type exclusion systématique).